Le neuf mai de la premiere annee

Славянин Санпэи
Le neuf mai; en francais, "neuf" est un chiffre mais aussi un adjectif qui veut dire: "nouveau".

Cela tomba ainsi, le neuf mai, nous nous sommes rendus a la grande ville pour des analyses. Nous esperions, bien-sur, egalement pouvoir participer a une comemoration de la grande fete.

Au laboratoire, la gentille demoiselle nous annonca le delai des resulats; encore attendre...

Du lointain, comme un arriere-gout d'un penible hiver, la menace, la misere se faisaient sentir. Le rues et le ciel etaient clairs mais presque vides. Si ce n est, et c est bien, la-haut, des etendues de pastels, de bleu ou un espoir discret miroitait, febrile mais heureux, rayonnait sur la ville, donnait l envie de vivre.

La retive gencive bourdonnait dans mon corps alourdi, maladroit. J eprouvais de la peine a penser, a marcher. Il fallait trouver un endroit ou je pusse me reposer.
L eau du canal attira mon regard, attisa mon desir de legerete, et par le flot tranquille, je nous laissai flaner...
Quand soudain, au-dessus des aires de verdure eparses mais vivaces, a travers les edifices de pierre dure, vorace, je vis dans l azur du printemps des bulbes et leur croix briller!

A bord des nuages qui flottaient autour, nous trouvames le courage de traverser le pont, de nous hisser plus haut. Je me souvins de ma sante fragile,  de mes jambes freles, de grand-pere, de notre chienne, la douce Diane, de nos balades sur la colline pour me fortifier le corps, m apprendre a compter. Et mus d amour, nous gravimes le paysage jusqu au sommet de la rive.

Nous aboutimes dans un square ou la nature et la pierre s etaient reconcilies. Des arbustes, des arbres pavoisaient sur des dalles de marbre, en paix.
Malgre le bruit des machines, l entretien des lieux, des branches nouvelles, percait le retour, la ritournelle des moineaux.
A quelques pas, un dome clair couvrait la belle mosaique; la Sainte Trinite contemplait l oeuvre des hommes: un petit coin romantique ou les oiseaux chantonnent une belle musique.

Nous degustames les victuailles que mon epouse avait preparees avec amour. Simples mais si tendres, j eprouvai une douce allegresse.
 
Vint l heure, le moment, ou il devait faire son discours et nous cherchames une onde ou le capter. Assis sur le banc, comme des millions d autres personnes, nous ecoutames avec la plus grande attention le discours du President. Si notre parc etait presque vide, la place rouge etait pleine. Il s exprimait en des mots simples et beaux avec tant de justesse, de sagesse. Il inspirait la force et l amour. Quelques larmes coulerent sur nos joues... Jamais dans ma courte vie, je n ai entendu de discours aussi senti et riche de sens chez un dirigeant. Que Dieu le benisse encore longtemps!

L enceinte blanche du monastere et musee refletait une douce lumiere. Les portes etaient ouvertes comme une invitation. Nous passames sous l arche et prirent le chemin du temple, y entrames. Tout aussitot, l encens exhala son charme, empli nos corps, comme un baume, un onguant lenifiant sur l ame; a la memoire des freres et soeurs tombes, de ma pauvre maman; du lointain du passe des souvenirs chatoyant jusque dans le present.

Pleine d attention, mon epouse m apporta une bougie. Les yeux fermes, je priai, nous priames. La petite eglise etait sombre, cependant en nos fors interieurs, nous sentions la chaleur des prieres, le refonfort de l icone, notre Seigneur et Sa Mere.

Quand je me retournai, le hasard me reserva une belle surprise, je vis l icone de l archidiacre et au-dessus d elle, celle de l archange; celui qui apporta a la Vierge Marie l heureuse nouvelle.

Je traversai la petite eglise comme porte par un air leger, eternel. Je vis l icone de Saint Seraphin de Sarov et puis celle de Saint Nicolas. Comme l enfant que je fus, mais sans douleur ni peine, je jouissais de l instant, du lieu ou chaque jour, notre Seigneur misericordieux pose un regard compatissant.

Je me tournai a nouveau: dans l intimite de l endroit, je vis un pretre nourrir une jeune ame attentive de bons mots, de sourires en priere. Oui, a l embrasure du temps, dans ce lieu beni, je me sentis vivant, a l abris du mal qui coule encore dans mes veines.

Puisse Dieu pour de nombreux jours accorder a son peuple l opportunite de venir prier. Puisse son peuple garder a l esprit, cherir en conscience que cette chance fut gagnee aussi au prix de beaucoup de sang verse.
   

A continuer